Le 28 mai l’Arménie était au centre de l’attention de la communauté internationale. L’occasion était la cérémonie de l’attribution du Prix humanitaire Aurora 2017, qui s’est tenue au Complexe sportif et culturel Karen Démirdjian.
Le Prix Aurora d’1 million de dollars a été décerné à un missionnaire catholique, Tom Catena qui était l’unique chirurgien dans les monts Nuba de Soudan. Le prix lui était attribué par le célèbre chansonnier Charles Aznavour, qui était venu en Arménie afin de participer à la cérémonie du Prix Aurora.
Durant toute la guerre civile entre le Gouvernement soudanais et le Mouvement de libération du peuple soudanais Tom a sauvé d’innombrables vies à l’hôpital « Mère de charité » (« Mother of Mercy»). C’est le seul hôpital qui fonctionne pleinement dans la région. Le Docteur Tom (c’est ainsi que les habitants l’appellent), a été envoyé à Soudan avant la guerre. Lorsque la guerre a commencé, on lui a proposé de quitter le pays mais il a insisté pour rester en argumentant qu’à ce moment-là plus que jamais les habitants avaient besoin de son aide. Même les bombardements aériens, devenus quotidien, et la famine massive ne l’ont pas dissuadé. Le Docteur Catena travaille 24 heures sur 24 et arrive à soigner jusqu’à 500 personnes par jour dans le cas où les organisations humanitaires sont interdites d’entrer dans le territoire et d’envoyer aux habitants de l’aide, de la nourriture ou des médicaments nécessaires. En 2016 aussi la candidature de Tom Catena avait été posée pour le Prix Aurora, mais il avait renoncé à participer pour ne pas laisser ses malades. Cette année il a accepté la proposition de participation seulement à la condition qu’on le remplace.
Notons, que l’Initiative Humanitaire Aurora a été fondée au nom des survivants du Génocide des Arméniens en gratitude des sauveurs. Son objectif est de continuer le cercle humanitaire en donnant de la vie et de l’espoir aux héros de nos jours. Aurora est une « action de gratitude », dont la priorité et de soutenir des personnes qui sauvent les autres, en risquant leurs propres vies.
Malgré son idéologie humanitaire, Aurora a été largement discutée et a soumis à la critique. Est-ce que la société pourrait-elle accepter d’une manière univoque une telle cérémonie, qui a lieu dans un pays, où quelque mois auparavant par la faute des autorités avait décédé Artur Sargsyan, « Le porteur de pain » (« Hats perogh »), dont le seul « péché » était son immense humanisme. D’après la demande du peuple arménien, Artur Sargsyan devrait être inclus dans la liste des candidats du Prix Aurora, mais les attentes du peuple sont restés insatisfaites
Une autre question a été soulevée par l’initiative civique « Le Front écologique panarménien». Celui-ci n’arrive pas à comprendre et à accepter la compatibilité d’« Aurora » humanitaire et du projet inhumain «Amoulsar». Afin d’éclaircir cette contradiction et cette incertitude, encore en 2016 « Le Front écologique panarménien» s’était adressé par une lettre ouverte à Rouben Vardanyan et Noubar Afeyan, cofondateurs de l’initiative Aurora, en demandant de commenter les contradictions qui existaient entre leurs activités humanitaires et la poursuite des intérêts économiques. D’une part la transformation d’un vaste territoire près de Djermouk en une mine ouverte, le financement du projet qui met en danger la provision d’eau d’Arménie de première importance, d’autre part la contradiction de développer l’Arménie et de présenter notre pays à la communauté internationale grace au tourisme, les hautes technologies et les remises de prix humanitaires. D’après la conviction du « Front écologique panarménien», le projet de la transformation d’Amoulsar en mine ouverte est « une vraie catastrophe humanitaire », en prenant en compte son influence dangereuse socio-écologique sur l’Arménie, ainsi que la provision d’eau douce de tout le territoire, notamment sur la ville d’eaux Djermouk et ses eaux minéraux.
Malheureusement, la lettre ouverte et les publications à ce sujet, largement véhiculée dans la presse, sont restées sans résonance.
Est-il possible qu’Aurora et le projet d’Amoulsar soient compatibles ? Est-ce que nous devons nous contenter de l’organisation des remises de prix humanitaires sans nous préoccuper de la catastrophe imminente survenue… Ce sont des questions qui nous donnent à réfléchir, si on veut créer un nouveau milieu sain, si on veut vivre dans un pays équitable et humanitaire.